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lundi 22 juillet 2019

Napalm Death ACOD TAF Saint Jean de Védas 4 juillet 2019

Parmi les vieux copains que l'on est toujours aussi heureux de retrouver tous les ans, Napalm Death serait un bon exemple. Chacun s'accorde à admirer le rythme que le groupe continue à tenir depuis plus de trente ans, avec une intégrité et un enthousiasme jamais défaillants comme en témoignait le souvenir encore fumant du set de clôture du Moshfest 2018. Si ce n'est peut-être pas mon classique ultra favori, je ne les ai jamais lâchés depuis que je les ai découverts. C'est l'un des plus anciens pensionnaires de ma discothèque, évidemment l'un des plus volumineux... et certainement le groupe étranger que j'ai vu le plus, sans pour autant avoir à beaucoup me déplacer tellement leur maillage de tournées tient la France serrée ces dernières années.


Retardé par un accident de circulation qui compliqua mon trajet, lorsque j'arrivai enfin les Toulonnais de MANIAC avaient déjà bien entamés leur temps de jeu. Ils servaient un Death mâtiné de HardCore rappelant Dying Fetus ou Despised Icon dans leurs débuts, avec quelques plans plus simples rappelant le PanterA plus mélodique. Le groupe gérait assez bien le blast et je regrette même qu'ils n'y insistent pas plus par rapport à des plans plus ordinaires sur des tempos plus lents. Le son, d'un niveau de première partie potable, n'aidait pas à singulariser le résultat. Il me semble que l'un des morceaux était une reprise non identifiée. Le public bougea un peu déjà, sans qu'on puisse espérer une explosion d'enthousiasme dans le pit, vu ce qui allait suivre.



Les Marseillais d'A.C.O.D. assurent régulièrement des premières parties de gros concerts ici où là dans le Midi, mais ce soir l'écart de style avec la tête d'affiche créait un beau challenge. La place manquant sur scène, le quintet n'y laissa que la batterie et les doubles épées de décor, occupant la place habituelle de la fosse en se retrouvant ainsi à hauteur du public. Leur Death Black symphonique se révéla assez bon pour une découverte pour un tout petit amateur du genre comme moi, avec un son compressé mais propre et bien équilibré, et des compositions franchement épiques. On pensait à un mélange entre Emperor comme élément dominant, Dissection ou Arch Enemy sans les soli. Quelques beumeus étaient certainement venus spécialement pour eux m'aperçus-je. Une partie des Grindeux n'éprouvait par contre aucun intérêt pour cet intermède divergent où le headbang dans des couleurs froides remplaçait le pogo.
Avec les poses et les harangues fréquentes au début, les peintures discrètes, le cuir léger conservé malgré la chaleur et une apparence générale travaillée, il devenait évident que les Phocéens visaient habituellement des scènes plus importantes et un certain professionnalisme. Et moi qui ne suis pas spécialement amateur de ce style, j'ai été assez emballé le temps d'un concert. Le dernier titre illustrait bien le bon usage des effets symphoniques, à part l'utilisation des quelques accords de piano en boucle qui ne me parait pas très pertinente. Un détail.

Pendant les pauses je me suis fait complimenter par plusieurs personnes pour mon t-shirt Carcass, que je ne pensais pourtant pas franchement original pour cette soirée… Le merch', justement, proposait de nouveaux t-shirts de Napalm qui ne décevront pas les traditionalistes les plus sourcilleux, ainsi que du matériel des deux premières parties.


Une fois installés tranquillement et toutes les balances faites, NAPALM DEATH attendit encore quelques instants que Barney rejoigne les trois autres pour balancer un enchaînement mortel tiré du plus profond de leur histoire "Unchallenged Hate" et "Instinct of Survival", provoquant une explosion généralisée du public entré au complet dans la salle. La férocité de la guitare, la vitesse légèrement accélérée de Herrera à la batterie, la colère de Barney paraissaient ensemble nous projeter au seuil d'un nouveau concert d'anthologie ! Et patatras. La basse de Shane lâcha au terme du second morceau, obligeant à tout arrêter le temps de s'en occuper. Cette panne était plus grave qu'en apparence, et on perdit une vingtaine de minutes dessus. Une partie de l'assistance ressortit, d'autres restèrent à blaguasser en se disant qu'au moins il était déjà certain que cet énième passage de Napalm resterait dans nos mémoires, afin de conjurer l'angoisse de voir que ça s'éternisait. Finalement l'un des groupes de première partie prêta sa basse et l'on put repartir.

Vous devinez que la reprise était un poil énervée. Les titres plus récents étant tout autant appréciés des fans, ce fut un flot continu de slammers qui écumaient (…) de la fosse en ébullition. Le son arrivait passablement modifié au détriment de la batterie après cet incident, mais quelques coups de mollette sur la table de mixage y remédièrent. Les discours de Mark Greenway se suivent et se ressemblent depuis des lustres, pourtant il s'y perdit une fois en oubliant le nom du classique pourtant obligatoire "Suffer the Children" qu'il devait annoncer, soufflé par John Cooke à son oreille (c'est dire s'il a pu s'intégrer !). Puis quand Barney expliqua soudain que le groupe était formé de gens qui écoutaient un tas de choses très différentes on se demanda qu'est-ce que cela annonçait, et ce fut ce "Self Betrayal" moins que probable, exhumé d'un vieil EP de la période groove, jurant par son rythme lent, sa longueur et son sarcasme dépité, qui dérouta légèrement la fosse. Normalement c'est sans doute ce choix qui aurait dû faire l'originalité de cette rencontre annuelle. Suivit le traditionnel passage par le Grind pur des premières origines, où le public annonça lui-même l'imparable "Scum" à l'oreille tendue de Barney. Au terme de ces quelques minutes de folie particulière et incontournables, chacun put distinguer les deux titres les plus courts de l'histoire de la musique.
Ayant trouvé une place dans un bon angle de vision et dans l'axe d'un ventilateur, j'ai pu tenir bon tout le set mais la salle s'était vidée un peu. Les moshers arrivaient encore parfois entre mes mains, péguant de plus en plus la sueur à mesure ! La première reprise, déjà entendue la dernière fois, était celle des Punks Suédois d'Anti-Cimex. Après être revenu à des titres plus récents pour un ultime tour, l'autre reprise carrément rebattue mais toujours sincère vu les propos introductifs passant par le français, des Punks Californiens. L'horaire étant largement dépassé du fait de la sortie de route initiale, les Midlanders n'en restituèrent pas moins le set complet prévu, achevé par ce "Siege of Power" rogue et idéal pour finir sur ce solo rare chez eux et totalement déglingué. Aucun rappel ne fut même demandé, vu l'épuisement général et l'heure.

Unchallenged Hate/ Instinct of Survival/ Continuing War on Stupidity/ When All Is Said and Done/ Smash a Single Digit/ Everyday Pox/ Standardization/ Suffer the Children/ Breed to Breathe/ Call That an Option?/ Self Betrayal/ Scum/ Life?/ Control/ Deceiver/ The Kill/ You Suffer/ Dead/ Cesspits/ Victims of a Bomb Raid (Anti Cimex)/ Silence Is Deafening/ How the Years Condemn/ Nazi Punks Fuck Off (Dead Kennedys)/ Siege of Power


Même en repassant par un certain nombre de figures imposées, même quand la malchance s'en mêle, Napalm Death demeure un monument incontournable, qui ne déçoit jamais ses fidèles, ni ses valeurs. Nous voilà regonflé jusqu'à la prochaine, et paré pour de prochaines aventures dans des territoires assez différents.

Municipal Waste Terror Shark Dirty Wheels TAF Saint Jean de Védas 1er juillet 2019

Ce même soir Slipknot se produisait aux Arènes de Nîmes mais plus aucune hésitation ne planait sur mon agenda depuis que cette affiche concurrente était officialisée ! Parmi le peloton de tête du revival Thrash, Municipal Waste est le dernier qui manquait à mon tableau de chasse, notamment parce qu'il n'avait encore jamais investi la Secret Place qui les a pourtant tous vus passer. Avec l'extrême chaleur des derniers jours j'avais espéré que la scène soit installée dans la cour mais cela ne semble plus possible à présent, par la faute de riverains pourtant largement éloignés. Bref. Heureusement, la clim' et les ventilateurs ont tenus bon la forte sollicitation pour rendre le concert tenable au moins dans les derniers rangs.

DIRTY WHEELS attaquait son set peu après mon arrivée. Les cinq Marseillais ne sont plus franchement des débutants malgré leur placement en ouverture. Ils jouent du NYHC Crossover classique, qui rappelle le bon temps des années 90, de Biohazard, Madball, Sworn Enemy… J'ai un peu tiqué sur la batterie mal tendue au tempo imparfait, d'autant que le mixage encore approximatif la privilégiait au détriment des deux guitares et de la basse, les solos en souffrant principalement. Le chant un peu yaourt à mon goût se plaçait cependant dans la droite lignée de la famille Miret-Cricien. Surtout, ces points faibles se compensèrent à l'aise tout d'abord par des compos de réelle qualité. Ces types savent écrire des titres de pur HardCore en variant les options possibles offertes par les canons du genre, et sans du tout abuser des chœurs aux slogans bateaux à faire reprendre en live en guise d'efficacité bon marché. Le succès public, réel bien que bridé par ce positionnement inaugural, s'y justifie. Il faut aussi saluer une attitude remarquable : Dirty Wheels est un groupe d'hommes fiers comme il se doit, mais où personne ne joue les cacous et surtout pas le chanteur. Dans le HC old-school, à Marseille, et très spécialement encore chez les groupes de HardCore Marseillais, c'est une qualité remarquable, remercions-en la Bonne Mère.

Fraîchement revenus de leur première prestation au Hellfest, nos locaux de TERROR SHARK. La formule des amis est au point. En trio batterie-chant-guitare, leur Crossover à eux plonge des racines un peu plus loin dans le temps vers M.O.D, D.R.I. et autres joyeusetés de cette époque avec humour et un enthousiasme inentamé. Les morceaux sont courts, trèèès directs, généralement structurés autour d'un bon riff tout simple, d'un refrain à reprendre ou d'un quelconque effet instrumental basique qui suffit à l'individualiser. La fosse s'y laissa prendre volontiers, les uns ou les autres s'en échappant pour reprendre ponctuellement un verset des paroles bien connus des paroissiens les plus fidèles du groupe. Et ce malgré le danger d'être croqué par l'un des deux mégalodons en plastique qui volaient et plongeaient dans le pogo, tradition incontournable de Terror Shark. La chaleur semblait oubliée par les nageurs du moshpit, qui n'avaient cure des pauses systématiques meublées entre chaque titre par Jérôme au chant, interventions complices et un peu bavardes. Elles avaient aussi pour but de laisser souffler ses partenaires, éreintés par un répertoire intense à reproduire. D'ailleurs il serait bien que le groupe prenne le temps de retourner un peu au studio et nous concocter de nouveaux titres, pour renouveler un stock trop bien connu maintenant. En attendant, les piètres squales gisant au sol tous dégonflés au terme d'un set ravageur donnaient une image de ce que le groupe donne à ses fans.

MUNICIPAL WASTE prit un peu plus de temps pour s'installer mais dès les premiers accords, les premiers coups de la double, on comprenait que ça allait être violent… Rapidement les moshers se sont totalement lâchés. À un tel degré d'ébullition que je n'ai presque rien vu avec mon mètre quatre-vingt de la scène à peine surélevée comme en témoignera le cliché illustratif... Les Virginiens envoient du Thrash, du pur Thrash qui ne se place sous le patronage d'aucun grand classique du genre en particulier, qui ne penche pas trop vers le Punk-HC, ni ne lorgne trop vers le Heavy, ce qui justifie leur statut au sein du mouvement dont ils incarnent sans doute la fine pointe par leur ancienneté relative et la pureté du produit fini, en dépit du bandana multicolore du batteur ! Le public connaissait d'ailleurs bien les morceaux et leurs textes, remplissant les silences volontaires du chanteur et réagissant au quart de tour selon les riffs.
La proximité de la fosse était dangereuse même pour les chevronnés, je n'ai pas vu certains astéroïdes sortir à pleine bourre de la ceinture pour me percuter à fond (par exemple dans la seconde suivant ledit cliché illustratif qui ne laissait rien prévoir comme vous en conviendrez) ! Le vrai responsable de ces collisions n'est jamais le mosher dérouté, de toute façon, sinon le groupe qui met son monde dans cet état. Rendez-vous compte, Municipal Waste est le seul groupe que j'ai vu à ce jour qui accélère le rythme en plein circle-pit, sans prévenir. Et les piteurs suivent ! Les vocaux éraillés, eux, ne partent jamais dans le décor. Les paroles reprennent des registres classiques du Thrash, avec une appétence sensible pour celui de la fête. Naturellement, "Terror Shark" fut joué et dédié au groupe précédent. Cela paraît évident, mais ils l'ont fait. Je n'ai pas vu passer le set même sans être fan, tellement le quintet illustre parfaitement ce qu'est le Thrash Metal, pour l'éternité, et non pas un simple phénomène de génération il y a une grosse trentaine d'années.
Nous avons traîné un peu pour laisser nos plaies rafraîchir, parmi une assistance qui avait été plutôt fournie et parfois venue d'assez loin. D'autres préparaient ce soir leur départ pour l'Obscene Extreme. Sans aller jusqu'en Bohême, un monument du GrindCore va nous honorer très bientôt justement.

mercredi 10 juillet 2019

Carcass Nitzer Ebb Myrkur Stiff Little Fingers Primavera Barcelone 30 mai 2019

Il y a quelques années j'avais découvert le Sonar, le festival Electro de Barcelone d'envergure mondiale. Pour 2019, l'autre grand festival musical de la capitale de Catalogne tombait à une meilleure date pour moi et proposait sur une journée une affiche suffisamment intéressante pour justifier un déplacement, au moins un jour, pour s'y initier enfin après une occasion manquée il y a deux ans. Le Primavera se différencie du Sonar par son orientation généraliste, malgré une vague prépondérance historique du Rock en général. Et sur un événement de telle importance, on peut toujours y trouver quelque chose d'intéressant.
Quelques jours avant l'arrivée le tableau d'ordre des groupes était enfin publié et, première déception, plusieurs groupes que je souhaitais voir allaient jouer en même temps. De plus cette programmation s'étalait vraiment jusqu'au petit matin – mais l'on sait bien que les Espagnols ne dorment pas – sans offrir grand'chose d'intéressant en cours de journée.
Qu'importe, le jour j nous passions les divers sas de sécurité et admission, alors qu'un doux beau temps régnait sur le gigantesque site du Parc du Forum, situé directement en front de mer à l'est de la ville. Le lieu d'accueil était réellement vaste, pouvant accueillir des dizaines de milliers de participants sans qu'ils ne se marchent dessus. Certains éléments comme le panneau photovoltaïque et le pont sur le petit port de plaisance voisin sont franchement monumentaux. L'inconvénient reste qu'il faut faire des kilomètres d'une scène à une autre, ce qui ôtait tout espoir de voir un bout de l'un puis un bout de l'autre.
Mon programme personnel avait l'avantage de se tenir exclusivement sur une même scène un peu à l'écart, et j'ai donc passé la première partie du temps à flâner dans l'immense périmètre pour m'imprégner un peu du concept. Tout l'équipement du festival confortable était à profusion pour pouvoir aisément se sustenter, s'asseoir, faire les vidanges et se laver les mains à l'eau recyclée, acheter des t-shirts ou des vinyles, etc. À la différence du Sonar, on peut encore payer en cash ce que je trouve beaucoup mieux. Habitué à traîner dans des scènes typées et homogènes, cela me faisait bizarre de me retrouver au milieu d'un public aussi varié, en tenues souvent extravagantes, des festivaliers venus du monde entier avec une forte proportion d'anglo-saxons y compris Américains. Entre les gays mélomanes, les hipsters déguisés et simples passants en tenue de routard des festivals, quelques t-shirts signalaient parfois des goûts voisins des nôtres au lieu d'un message arty… Et encore faut-il décompter les imitations comiques de design Metal, selon la mode des dernières années. Les stands de vin, de spritz ou de "sensibilisation aux violences de genre" confirmaient que c'était quand même un autre monde. Au milieu de tout ça on pouvait aller regarder quelques minutes du gros hip-hop ici, des rockeuses énervées mais sympas là-bas, Christine and the Queens (and surtout ses danseurs) sur une autre scène expliquer en anglais qu'elle voulait se faire appeler autrement maintenant… et j'en passe car le premier rendez-vous approchait enfin.

Sur une petite scène face à la mer, à l'angle de la passe du petit port de plaisance voisin, STIFF LITTLE FINGERS se présentait légèrement en avance. Ce groupe Nord-Irlandais est une vieille institution encore vivante de la première vague Punk de 1977. Le son était impeccable pour ce style, les quatre membres avaient les dégaines des pépés de la scène qui n'avaient rien à prouver en tant que vieille machine qui tourne très bien. Bien que Britanniques, leur Punk-Rock dansant et le chant de tête aigu du chanteur-second guitariste faisaient beaucoup plus penser aux Ramones ou à la scène mélodique Californienne d'Epitaph. Le public s'y prit facilement, ce genre marche encore très bien en Espagne. L'attitude sincère et sans manières du groupe le rend incontestablement sympathique : après avoir déclaré que vu le peu de temps accordé il parlerait peu pour pouvoir jouer plus, le chanteur présenta quand même quelques titres parlant du racisme, de sa dépression ou de leur titre le plus Heavy Metal (parce qu'il y a un peu de moulinets…) rappelant leur précédent set en ouverture de MetallicA quelques jours avant. Je n'ai pas vu le set passer jusqu'à leurs grands classiques en fin de set bien connus des fans apparemment… Sincère, direct, intègre, accessible et maîtrisé, ces atouts simples suffisaient à convaincre et m'emballer enfin dans le festival.

Après un nouvel intermède je revenais au même endroit pour voir CARCASS, venu spécialement pour l'occasion hors toute tournée. C'est l'un des premiers groupes que j'ai découvert dans le Metal extrême, jamais lâché depuis et je n'avais pu les voir qu'une seule fois en raison de la longue période de séparation. Y'avait donc encore de l'émotion même si je savais à quoi m'attendre.
N'ayant pas d'album à promouvoir, une fois passée l'intro on attaqua toutefois de plain-pied les classiques lourds par l'attaque féroce de "Buried Dreams" entonnée encore en forme par Jeff Walker dans son t-shirt de Crass, suité sans pause par deux monuments qui comblèrent les fans massés en assez bon nombre. Le vent s'était levé avec la tombée de la nuit et cela gêna un peu le rendu du mixage et Tom Draper, nouveau second guitariste, n'était pas parfaitement assuré sur le premier solo que Bill Steer lui laissa. L'ex Napalm Death, lui, maîtrise tout sur le bout des doigts caché derrière sa tignasse hors d'âge. Surexcité, Walker commença à semer un peu trop souvent ses mediators, y compris au cours du long passage consacré ensuite à "Surgical Steel". Si les intros samplées étaient un peu malmenées par un quartet enthousiaste et pressé d'enchaîner, après une énième blague de Walker la montée de l'intro de "Genital Grinder" laissait enfin une place symbolique au plus vieux passé Goregrind qu'ils n'assument plus tellement au profit du Death Mélodique vite réaffirmé par deux extraits de "Heartwork". Le passage chant-batterie de "This Mortal Coil" fut sectionné apparemment sans concertation par Wilding, globalement très professionnel derrière ses fûts. S'il partait bien par le riff assassin de l'intro' de "Black Star", l'unique évocation de l'album le plus Heavy Rock du groupe passa pour le moment un peu faible du concert, avec une recomposition du morceau qui l'émousse en live. Ceci dit cela permit au public de souffler un instant, ma propre nuque vous le confirmerait. De son côté, l'espèce des mélomanes curieux qui ont entendu du son et sont descendus voir, très rare en concert payant et beaucoup plus observée en festival, s'étant enfuie depuis un moment.
Toujours à la blague, Walker lança quelques bouteilles aux braves de la fosse en précisant ensuite qu'elles étaient remplies de sa semence et d'un peu de merde. Finalement, le Goregrind demeure encore ! D'ailleurs on revint enfin vers l'option Death-Grind mélodique pour la fin du set, avec une agressivité à présent éprouvée mais qui réjouit encore des fans marqués par une douzaine d'années de disparition au profit de projets bien moins tranchants. Le dernier riff de "Carneous Cacoffiny" plaqué sans effet ni transition faisait comprendre clairement à tous ces vieux fidèles qu'on allait débrancher. Après un salut enthousiaste devant une assistance comblée, une petite explication sans gravité sembla avoir lieu entre Walker et Wilding qui rangeait sa batterie. Peu importe, pour moi le voyage était déjà rentabilisé.
1985/ Buried Dreams/ Exhume to Consume/ Reek of Putrefaction/ Incarnated Solvent Abuse/ Unfit for Human Consumption/ Cadaver Pouch Conveyor System/ Captive Bolt Pistol/ Genital Grinder – This Mortal Coil/ Death Certificate/ Black Star – Keep On Rotting/ Corporal Jigsore Quandary/ Ruptured in Purulence – Heartwork/ Carneous Cacoffiny outro.

Les horaires des différentes scènes ayant fini par se décaler inévitablement, j'ai pu voir un petit bout de l'Indie-Rock Noisy Lo-Fi de Guided by Voices, pour fans de Shellac ou Sonic Youth qui connaissaient déjà de toute façon.

Un peu plus tard encore MYRKUR investissait avec trois comparses la scène décorée de boules lumineuses perchées sur des supports imitant des arbustes blancs, son micro lui-même collé à une plante verte mal identifiée ressemblant à du magnolia sans cellulose. Le Dannebrog était fixé au fond à côté des potards. On n'imagine pas tellement du Black à ce genre de festival… mais justement on sait aussi combien la Danoise attise les débats dans une scène aussi attentive à sa pureté. De fait elle a servi en réalité un mélange de Folk-Ethereal à fond Black Metal, avec son chant à la Liv Kristine invitant au doux rêve de paysages enneigés. Le son sortait très lisse, froid mais propre, la guitare mixée avec modération. Apparemment elle eut quelques problèmes techniques dont elle parla entre deux titres mais sans grandes conséquences franchement, sans doute les retours. Les éclairages étaient assez jolis et recréaient régulièrement le logo du projet. Par contre je ne comprends pas comment on a pu laisser les ventilateurs de scène en marche : ils ne servaient vraiment plus à rien en pleine nuit à quelques mètres de la mer, sauf à laisser voir plus qu'il n'en fallait des formes d'Amalie Bruun dans sa robe de mousseline blanche !!!
Quelques blasts, rares mais d'autant plus percutants, rappelaient que l'enracinement Black était réel quoiqu'on puisse juger du résultat. De fait, Myrkur confirme qu'aujourd'hui le simple rattachement à cet univers ne fait plus peur à une bonne part du public, à un point certainement regrettable. En effet si les gens sont restés, les Espagnols ne se gênent jamais pour continuer à parloter à voix forte pendant les concerts dès que le niveau sonore le permet, comme c'était ici. Je me suis rapproché en plusieurs étapes pour échapper à cette tradition nationale agaçante qu'on ne s'attendrait pas à voir ressurgir devant du Metal, c'est évidemment significatif. Pour clore le set, l'artiste resta seule avec un tambour viking et chanta un bref titre traditionnel acoustique. À condition de ne pas se complaire à tout crin dans les malentendus sur Myrkur, ça ne m'a pas paru horrible.

Au bout de la nuit il me restait un ultime groupe à voir, qui avait en bonne partie motivé le fan d'EBM traditionnelle que je suis à venir découvrir le Primavera. NITZER EBB est devenu parmi les pères fondateurs du style le plus emblématique. Le duo s'est actuellement reformé, depuis qu'ils s'étaient récemment retrouvés comme par hasard invités ensemble dans le projet Black Line, ce qui leur a donné envie de remettre le couvert une fois encore puisque, Dieu merci, les envies de faire autre chose n'avaient jamais donné lieu à de brouilles entre Bon Harris et Doug McCarthy. L'avenir n'étant jamais certain, je ne voulais pas les laisser passer comme en 2011 !
Tout juste débarqués d'une tournée Américaine, le groupe actuellement en formation à quatre revient bien rodé et a choisi clairement d'emprunter à présent le versant techno et épuré de l'EBM. Aussi la setlist était nettement orientée vers le répertoire le plus ancien au détriment des albums plus récents qui avaient préféré la voie du Rock, notamment celui de la précédente reformation totalement écarté bien qu'excellent. Qu'importe ! Cela laissait une brochette de vieux classiques enchaînés tous ensemble avec la fluidité offerte par les beats programmés et les boucles, dans une ambiance très club avec ces lumières chaudes largement envoyées vers le public, la fosse Punk ou Goregrind du début de la nuit se transformant en dancefloor où l'on se démenait volontiers entre quelques boulets qui voulaient danser en tournant le dos à la scène (compatriotes en plus apparemment…) et un grand type complètement perché à la MDMA.
Certains titres étaient non seulement arrangés pour les transitions mais même légèrement remixés par rapport à leurs versions originales plus sèches et moins dansantes (voir par exemple "For Fun" très vite). Malheureusement le son n'était pas fort de reste et les basses, si importantes en matière d'EBM, ne ressortaient pas autant qu'il aurait fallu.
Visuellement, par-delà l'éclairage éblouissant, le spectacle se partageait comme d'habitude entre le petit Bon Harris martelant assez spectaculairement une petite batterie électronique et le premier plan entièrement pris par le grand Douglas McCarthy, tous deux de noir vêtus. Le charisme sensuel et viril du chanteur, en veste et lunettes noires totalement pour le style, fait toujours son effet de par son jeu de scène physique, expressif, en accord profond avec une diction parfaite ne laissant perdre aucune syllabe. Comment ne pas penser par moments à son vieux copain David Gahan ? David Gooday et Simon Granger, à moitié cachés derrière leurs écrans et des toiles, restaient concentrés sur les programmations en dodelinant toutefois de leurs crânes bien rasés au diapason de celui du boss Bon…
Ce dernier rejoignit Doug sur le devant pour partager les vocaux de "Getting Closer" comme en version studio. Si la communion était scellée une heure durant avec le contrebas de la scène, cela atteignit bien évidemment le sommet avec ce "Join in the Chant" rallongé pour la joie générale. De toute façon la kyrielle de refrains de dancefloor ponctuant quasiment chaque titre était connue par cœur de tous, y compris certainement des camés partis mentalement trop loin pour les reprendre avec les cleans… Après que Doug aie présenté rapidement la formation, la boîte à rythmes et ses accompagnements s'arrêtèrent en douceur comme un moteur dont on couperait l'alimentation, et tout le monde s'éclipsa assez vite vue l'heure et la fraîcheur revenue.

Blood Money/ For Fun/ Captivate/ Hearts & Minds/ Getting Closer/ Lightning Man/ Fun to be Had/ Shame/ Join In the Chant/ Family Man/ Control I'm Here/ Let Your Body Learn/ Murderous.

Nitzer Ebb revient en bonne forme, faisant revivre pour une durée indéterminée sa propre conception de l'EBM, celle que les DJs et fans de techno trouvent la plus inspirante, complémentaire des shows surpuissants et bien chargés de Front 242, du Metal Indus des Krupps comme de l'Electro Punk de la partie la plus underground de cette scène.

Même si je ne me suis pas trop reconnu dans l'esprit généraliste et bien-pensant du Primavera, je n'exclus pas d'y revenir si une autre fois la programmation vaut le coup. Dans l'immédiat, nous nous remettrons à consommer local et l'été promet d'être chaud dans les t-shirts, dans le pogo !