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vendredi 12 août 2022

Igorrr Horskh Paloma Nîmes 2 décembre 2021

De nouvelles restrictions étant parfaitement envisageables à portée de vue, il faut profiter des concerts avant Noël. D'ailleurs, je n'avais pas encore renoué avec la sensation de s'exporter un peu pour une affiche motivante, qui fait partie intégrante de la vie du concertophile. Cette tournée d'Igorrr a été repoussée deux fois et je me suis décidé dans les derniers jours, quand c'était complet. Et puis l'avant-veille, quelques places ont été remises en vente, pour le bonheur des retardataires vigilants. En avant donc pour le court déplacement vers Nîmes.


Le grand parking de la SMAC municipale Paloma était très froid mais copieusement rempli. Cela s'expliquait, quand on était rentré, par une double programmation : il y avait de la Trap neurasthénique dans la grande salle. La petite red room étant bien configurée, pas de regrets. Par contre, on aurait mieux fait de ne pas oublier son argent dans la voiture… Dans le long couloir de desserte tout jaune, seul notre concert à nous proposait du merch, tandis que dans la cour les deux publics se mêlaient un peu.


Nous avions déjà vu HORSKH en première partie des Young Gods il y a quelques années dans un inoubliable show en plein air peu imaginable ce soir. Et c'était au moins à moitié en souvenir du tampon qu'ils m'avaient mis que je voulais être là. Pourtant, j'avais entendu dire que l'album qui s'est ajouté entretemps à leur discographie amorçait une évolution. Et, de fait, la présentation et les compos ont évolués. Après une intro calme qui ne visait évidemment qu'à amplifier le coup des premières notes à fort volume comme il faut, on constatait que la base duo batterie – chant et programmation s'est étoffée d'un troisième membre qui appuie essentiellement les parties instrumentales, mais parfois aussi le chant ou la guitare. La bonne vieille gratte qui vient parfois épaissir certains morceaux sans écraser le mix. Les nouveaux morceaux n'ont pas modifié le son du groupe mais sont moins directs, brisant les montées pour créer des frustrations un peu sadiques pour l'auditeur un peu à la manière du Breakcore cher à la tête d'affiche. Cela rapproche encore plus nettement le travail des Bisontins de celui de Skinny Puppy, Numb ou de Youth Code plus récemment, inspirations déjà claires auparavant. Leur musique tente à présent de s'adresser aussi au cerveau, mais cela n'empêche pas les auditeurs de danser sur un propos encore bien dur et physique. Détail parlant : le chant réverbère mais évite astucieusement d'être aussi distordu que dans la pure Dark-Electro.

Visuellement, la lumière rouge est toujours très présente et le spectacle est assuré par la présence énergique d'un chanteur qui est partout à la fois et quelques mises en scène comme ce bref instrumental martial en trio aux batteries physiques et synthétiques. Le léger maquillage accentue encore l'hommage à SP. À mesure que le set avance, quelques titres plus anciens ou plus directs ont permis d'atteindre pleinement le défoulement attendu et de se dire que la soirée était gagnée quoiqu'il arrive. Cette Electro-Indus agressive, un peu métallisée, plus fine et plus traditionnelle, va certainement mieux passer l'épreuve du temps que la Dance saturée pour cybergothiques.


L'interlude était meublé par des sonates au piano seul, normalement incongrues mais préparant les esprits à l'option néoclassique qui allait suivre.


IGORRR est d'abord le projet de Gautier Serre, qui vient du Breakcore. Ce fait est confirmé par l'entrée en scène : le fondateur monte seul sur une estrade centrale au second plan et entame le set par un morceau à la Venetian Snares, avant que ne le rejoignent les autres membres d'un groupe largement renouvelé tout récemment. Sylvain Bouvier de Trepalium est resté à sa batterie sur la droite et un nouveau guitariste est arrivé. Surtout, Jean-Baptiste Le Bail – que nous avions vus il y a quelques semaines avec Svart Crown – prenait le chant en premier avec son growl et sa dégaine de beumeu à warpaint spectaculaire tout de voir vêtu. Il sera rejoint peu après par la nouvelle soprano, toute menue, qui fera sans cesse des allers-retours avec les coulisses pour changer de costume ou prendre un accessoire dès que ses parties étaient terminées. Parfois, Gautier lui-même prenait une guitare pour appuyer certains riffs depuis son perchoir.

Igorrr se construit sur les paradoxes et les enchaînements surprenants. Les morceaux nous ballottent sans cesse de gros passages Death adipeux à quelques instants de grâce baroque à la Klaus Nomi, en passant par des ponts Breakcore, des samples invraisemblables mais soigneusement pensés, ou des passages épiques empruntés au Black. Il est impossible de s'installer longtemps dans une émotion, cela est même le cœur de l'expérience. C'est aussi éprouvant que du Metal plus extrême, au fond, mais pour une raison presque inverse. On ne peut pas tout décrire dans ce voyage à la Lewis Carroll passant par l'Arabie, France Musique, le Flamenco que tout bon Sudiste se doit d'aimer, l'asile de fous et tant d'autres lieux. Mais le sommet revient à mon avis à ce riff bien Norvégien de fin de morceau à peine installé pour être repris à la flûte scolaire ! Il y avait de nombreux fans qui prenaient leur pied dans la fosse ou en reprenant les paroles. Au milieu de tout ça, le titre porté par la chanteuse Grecque quasiment seule en milieu de set a apporté un moment de recueillement appréciable.

Parlons d'elle, justement. Pour quelqu'un qui vient d'arriver sa performance m'a paru remarquable, notamment sur ce morceau mais aussi par toute l'énergie physique contrôlée qu'elle a mis dans ce set, son aisance tant dans le chant que dans la mise en scène par ses costumes (j'ai surtout aimé la cape Mayhemesque muant peu à peu en accessoire léger) ou par ses accessoires (le crâne Hamletien ou le squelette porté comme un bébé). J'ignore son parcours antérieur dans le chant classique, mais on pourrait lui proposer un CDI. Au-delà des pompes, l'aspect opératique est visible aussi dans ses parties partagées avec J.-B. Le Bail, qui se mettent en scène pour chanter ensemble ou alterner, dans un répertoire beaucoup moins guindé que le format "la belle et la bête" cher à un certain public d'outre-Rhin. Enfin la présence de Sylvain Bouvier n'est pas seulement un gage donné aux orthodoxes qui ne conçoivent pas de Metal sans batterie, il apporte de la complexité et de l'intensité aux rythmes, et bien entendu un toucher qui contribue au lien entre la part la plus humaine de ce Metal déjanté, et le cisèlement raffiné des programmations.

Au bout d'une heure à ce régime déstabilisant mais vivifiant, un premier départ du groupe provoqua un rappel par un de ces titres de musette écartelée que je n'apprécie pas trop, mais qui permit aux premiers rangs et aux musiciens de dansotter quelques instants. Après un ultime salut, ces derniers laissèrent Gautier Serre, le patron, seul à nouveau, pour un final uniquement Breakcore qui laissait redescendre tout le monde en l'absence du gros son de la guitare, mais sans vraiment relâcher la tension de folie douce. Au bout de quelques minutes à ce régime revenant aux bases de son entrée dans la musique active, les lumières se rallumèrent. C'est la Marche Funèbre de Chopin sournoisement déversée du plafond qui se chargeait de pousser la cohue vers la sortie dans une atmosphère rafraîchie. Ce n'était rien encore par rapport au mistral nocturne glacial qui soufflait à l'extérieur de la salle !


Honnêtement je ne m'attendais pas à un aussi gros concert, mon faible penchant pour le Metal d'avant-garde ne m'avait pas permis de prendre la mesure du succès d'Igorrr ni de sa contribution. Pour nos derniers concerts de l'année, ce sera moins purement Metal d'ailleurs.


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