Suicidal Tendencies, typiquement le groupe très important pour les autres et que j'appréciais peu. Mais le poids historique du groupe, justement, motive quand même bien plus tard à faire un court déplacement pour les voir.
Et d'ailleurs c'est l'occasion de découvrir la nouvelle salle destinée à réveiller les soirées nîmoises. Pour ceux qui ne connaissent pas la région, Nîmes est hélas une ville jolie mais morte sauf pour les deux weekends annuels de feria. À part les grandes affiches de prestige du festival d'été aux arènes, l'offre de concert était inexistante et tout se passait à Montpellier, il y avait même plus de choses à Arles et Avignon. Mais ça, c'était avant. Depuis un an cette nouvelle salle a été ouverte sur la route d'Avignon à deux pas de l'autoroute et propose enfin une programmation sérieuse, pouvant faire naître un public local, et tout aussi profitable pour les Montpelliérains et les Provençaux.
La Paloma, sous son architecture moderne pas très réussie au coup d'œil extérieur, offre tout le confort fonctionnel d'une salle récente bâtie à l'extérieur de la ville sans aucune contrainte extérieure. En plus, c'est très propre. Cela rappelle beaucoup le Bikini de Toulouse ou le Jas de Rod. Il y a un bar dans la cour intérieure dont on pouvait encore profiter malgré les fortes bourrasques dehors. De quoi confirmer d'abord que les voisins précités s'y retrouvaient en nombre, plus une ou deux rencontres surprenantes le bandana bleu sur le front et vieux t-shirt "ST" sorti du grenier fièrement tendu sur un ventre envahissant !
En ouverture THE INSPECTOR CLUZO duo né sur les cendres de Wolfunkind, affiche fièrement ses origines Landaises, avec drapeau arboré sur scène et tenue du dimanche de nos arrière-grands-pères béret compris. Le batteur et le guitariste-chanteur nous ont servi un Blues-Rock Funky à haute dose d'humour, entrecoupé de nombreuses expressions en occitan gascon. L'expérience aidant, le duo joue très bien sur son petit matériel et le guitariste a vraiment une bonne voix capable de survoler les aigus Funky comme de chanter le Rock avec puissance et justesse. Cette efficacité emballa facilement les plus chauds dans la fosse. Le ton burlesque du show déridait les plus réservés, avec un titre contre les bassistes, l'invitation d'un spectateur à danser lascivement sur scène à l'imitation du batteur, le jet récurrent des cymbales, des vannes incessantes.
Tout ceci dit, j'ai trouvé que sous ces dehors sympathiques et une interprétation largement pro, ça tournait un peu en rond. L'humour ne fait pas tout et les compos restaient très basiques, très proches du bœuf mémorisé et à peine restructuré comme c'est souvent le cas dès que le Funk s'en mêle. Je manque peut-être de légèreté… D'autant que si leur côté terroir ne peut que me plaire, leur démarche purement DIY avec des tournées incessantes dans le monde entier force encore plus le respect. En tout cas ST les emmène tourner avec eux en Amérique.
Après un faux départ cinq minutes trop tôt, SUICIDAL TENDENCIES déboulait avec "You can't Bring Me Down !" sous les acclamations. D'habitude même les plus grands groupes ont besoin d'un ou deux titres pour bien reprendre leurs marques mais là, c'était interprété aussi bien qu'après vingt minutes de répète. Car malgré la disparition quasi-complète du line-up historique, les nouveaux ST ne sont pas des amateurs. Mike Muir galope toujours d'un bout à l'autre de la scène et se montrait très communicatif. Le set était équilibré entre les trois facettes HC, Thrash et Funk, mais fit l'impasse sur plusieurs albums à ce que je crois.
Si les solos de Dean Pleasants sont remarquables, le pauvre Tim Williams à la basse a eu de gros pépins dès "War Inside My Head" qu'il avait d'ailleurs introduit. Ça ne l'a pas empêché de descendre jouer dans la fosse plus tard. Combien de vocations de bassistes sont nées à l'écoute des slaps des divers bassistes qui se sont succédés chez ST ? Proche de ses fans qui étaient bien en forme devant, Muir fit monter le public pour "Possessed to Skate", et alla aussi chercher plus tard un spectateur en fauteuil roulant pour le mettre sur scène, avec une attention dans les gestes qui me laisse penser qu'il doit avoir des proches dans la même situation. Dans ce foutoir bon enfant et virtuose se promenait souvent un quasi cinquième membre avec une mini caméra sur pied, qui filmait essentiellement le public.
Et Muir fit remonter les gens pour le dernier titre de Suicidal. Mais au lieu d'un rappel, pour apaiser l'excitation générale, Dean Pleasants nous servit deux titres instrumentaux de son prochain album solo, conformes à ce qu'on pouvait en attendre, accompagné d'un bassiste différent sorti des coulisses mais toujours de Moore et Santora. Et pour finir de façon un peu plus énergique, Muir revint pour une reprise d'Infectious Grooves. Le set avait quand même duré plus d'une heure et demie sans que personne ne s'en aperçoive.
Ce fut un bon moment même pour des non-fans comme moi, et nous avons tout à gagner à ce que l'offre de salles s'étoffe dans la région.
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